Une fable contemporaine dérangeante !
« La plupart des hommes ne soupçonnent pas chez eux la part sombre que pourtant tous possèdent. Ce sont souvent les circonstances qui la révèlent : guerres, famines, catastrophes, révolutions, génocides. Alors quand ils la contemplent pour la première fois, dans le secret de leur conscience, ils en sont horrifiés et ils frissonnent. » (p. 147)
« L’ Archipel du Chien » est le nouveau roman de Philippe Claudel, à la couverture magnifique que Nathalie de la librairie Doucet va nous présenter.
– CB : Est-on dans un univers, entre le romanesque et le thriller ? – NP : – Un petit peu ! – CB : Pour nous situer, pouvez-vous nous en dire un peu plus, Nathalie ?.
Philippe Claudel écrivain de longue date a déjà écrit une dizaine de romans mais est aussi scénariste de films. Là, il nous emmène dans une île imaginaire appelée
L’ Archipel du Chien
que l’on ne sait pas très bien situer, mais de par le sujet du livre, on peut penser à la Méditerranée.
Alors, nous sommes sur cette petite île un peu fermée, qui vit recluse, sur elle-même. Les habitants ne sont pas très ouverts sur le monde extérieur et ce qui se passe ailleurs les intéresse assez peu. Comme habituellement, chaque matin, l’ancienne institutrice se promène sur la plage accompagnée de son chien et découvre trois corps, des gens de couleur, trois cadavres. Bien sûr, elle appelle le maire du village, le médecin, le curé et tous décident, alors que ces corps sont sans papiers, de ne pas ébruiter l’affaire. Visiblement, ce sont des migrants décédés, vraisemblablement tombés d’un bateau, ayant échoué sur la plage… Sur cette île, un projet de Centre thermal est en pourparler. Pour ne pas gâcher et faire de mauvaise publicité sur l’île, ils décident de cacher les corps et de les enterrer eux-mêmes. Surtout de ne pas faire de vague (!). Sauf que se trouve mêlé à cette histoire, le nouvel instituteur, bien plus jeune, venant du continent, déjà considéré un peu comme un étranger par les habitants de l’île, se laissant au départ embarquer dans cette histoire. Il finira par manifester son désaccord : -« Non ! Attendez ! – Cela ne va pas du tout ! Ce qui est entrain de se faire, est inadmissible . » – « Il faut déclarer ces morts ». Le livre débute comme cela.
Et, c’est toute une cabale et une machination qui vont se mettre en place contre ce jeune instituteur pour l’empêcher de mener à bien son projet : –de dire la vérité…. C’est machiavélique ! – [Ça vous prend…. Il vous emmène…], cela démarre petit à petit puis la pression va crescendo…
Alors, c’est un livre dérangeant. C’est un livre coup de poing parce qu’effectivement, il bouscule la bonne conscience de ces gens. Mais en même temps, il bouscule aussi notre bonne conscience.
CB « On peut poser nous-mêmes la question de ce qu’on aurait fait ? Est-ce qu’on est plus comme l’instituteur ou les autres ? »
Et puis c’est aussi ce monde de migrants qui existe, qu’on connaît par les informations, dont on est conscient et pour lesquels on ne fait rien ou si peu.
Un livre qui monte en puissance au fur et à mesure des pages et dans lequel on retrouve le Philippe Claudel dans « Les âmes grises », dans « Le rapport de Brodeck » ou de « La petite fille de Monsieur Linh ».
Nathalie/M. Christine
Écoutez Nathalie de la librairie Doucet en compagnie de Charlotte Bouniot en cliquant ici.
« L’ Archipel du Chien » – 288 pages – Prix : 19.50 €
Philippe Claudel est à l’académie Goncourt depuis 2012. Il est enseignant et auteur de : « Il y a longtemps que je t’aime » (2008) –« Tous les soleils » (2011) – « Une enfance » (2015) – « Les âmes grises » (prix Renaudot en 2003), le prix Goncourt des lycéens (2007) – « Le rapport de Brodeck » prix des libraires du Québec (2008), prix des lecteurs du livre de poche (2009) – 2013 « Parfums » prix Jean-Jacques Rousseau de l’autobiographie.
2 réponses à “L’ Archipel du Chien – Philippe Claudel – Editions Stock”
Oui, une fable dérangeante. Une fable puisque nous sommes sur une île imaginaire (magnifiquement représentée sur la jaquette), que les personnages le sont aussi. cependant dérangeante car elle parle de l’être humain et de sa conscience. On est capable parfois du pire pour tenter de mettre en phase ses souhaits personnels et ses actions; On peut même désignes un bouc-émissaire (qui n’est pas d’ici bien sûr) pour rejeter sur lui la culpabilité que l’on n’est pas capable d’assumer et alléger ainsi, croit-on, le poids de sa conscience.
Un excellent Philippe Claudel auteur de cette parabole sur »la codition humaine et la chute ».
M-J 72
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Pardon pour les fautes,j’ai mal relu.
« On peut même désigneR »
« la coNdition humaine », bien sûr !
Mille excuses.
M-J72
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