Entre ombre et lumière
En lice pour le Renaudot et pour le Goncourt 2019, voici le dixième roman de Nathacha Appanah.
Un ouvrage très court (125 pages) dans lequel l’auteure décrit une mère dépressive qui a élevé seule ses deux enfants, prénommés Paloma et Loup, nés de deux pères différents, des prénoms de fauve et d’oiseau –des griffes pour mieux se défendre et des ailes pour voler– mais qui, hélas ne serviront à rien ! La mère s’appelle Phénix (alias Eliette). Elle a traversé beaucoup de difficultés dans sa vie. Elle n’arrive jamais à donner l’amour qu’il faudrait à ses enfants. Ils vont ressentir ce manque d’amour et peu à peu vont s’éloigner d’elle. Paloma, va partir de chez elle (ça se passe dix ans auparavant, avant le début du roman), ce lieu où Phénix, la mère vendait des pièces détachées... Puis, c’est au début du roman qu’on apprend que Loup va fuguer, une fugue qui va tourner au drame, commettant l’irréparable, rouler sans permis avec la voiture de sa mère, provoquer un carambolage, se faire arrêter par la police et terminer à la Maison d’arrêt pour mineurs. Pourquoi Phenix n’arrive-t-elle plus à aimer ses enfants ? Tout le roman va s’intéresser à l’histoire de cette mère, l’alliant même à celle de ses parents, de ses enfants…. Dans son enfance, Eliette (devenue Phénix) était une petite fille très particulière, à la beauté remarquable dont les parents débordant d’amour, en adoration devant elle. Ils ont voulu exploiter « le filon » et en faire une « Reine de beauté » (chaussures à talons, photos, maquillage, chanter devant les adultes etc..) jusqu’au jour où un collègue de son père a abusé d’elle…..et, puis c’est la descente aux enfers dès ses 11 ans. Plus tard…, à 16 ans, murée dans son silence, alors qu’elle incendie la maison de ses parents, des séjours en milieux psychiatriques seront nécessaires. Eliette ne sera plus Eliette ! Devenue mère à son tour, mère plutôt immature, n’a pas d’amour à distribuer à ses propres enfants : Paloma et Loup, un schéma d’amour qu’elle n’a pas voulu reproduire.
Deux enfants qui ont hélas grandi en fleurs venimeuses sur un mauvais terrain !
De nombreuses réflexions naissent de ce roman à propos de l’amour que l’on reçoit, que l’on perçoit, ou de celui que l’on donne ? Pour Phénix, est-ce la raison de ce trop perçu d’amour ? Elle est devenue trop distante, trop froide avec ses propres enfants ? – Est-ce qu’on aime ses enfants comme il le faudrait, suffisamment ou pas assez ? C’est un roman qui ne parle pas du milieu carcéral, mais de ces prisons que chacun porte en soi.
Ce nouveau roman est une vraie merveille. La beauté de l’écriture, l’histoire puissante de ce trio et ses questionnements sur les traumatismes de l’enfance mais aussi sur les liens familiaux.
La poésie, la grâce, le style, la beauté de l’écriture : quelle magnifique lumière à travers cette noirceur !
Ci-dessous, le poème de Paul Verlaine écrit en 1873 alors qu’il est en prison en Belgique après avoir tiré sur son ami, Arthur Rimbaud, publié en 1881 dont est extrait le titre du livre :
« Le Ciel par-dessus le toit » de Nathacha Appanah
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
Chante sa plainte.
Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.
Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
Librairie Doucet Le Mans/Marie-Christine
Nathacha Appanah est l’auteure de neuf livres qui construisent un œuvre forte et singulière. Son dernier roman, « Tropique de la violence« a reçu quinze prix littéraires.
« Le ciel par-dessus le toit » – 125 pages – prix : 14 € – (parution : juin 2019)
Une réponse à “Le ciel par-dessus le toit – Nathacha Appanah – Éditions Gallimard”
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