Histoire de l’Art en temps de guerre
« C’est du pays tout entier qu’on hérite » . Marguerite Yourcenar (1975)

La Part des cendres suit le destin, entre 1812 et aujourd’hui, d’objets volés, brûlés ou perdus dont un manuscrit retrouvé de la Comtesse de Ségur. La Part des cendres mêle subtilement, à la fois des personnages réels à des personnages de fiction, dans une langue somptueuse. La Part des cendres s’ouvre sur Henri Beyle alias Stendhal marchant dans Moscou en flammes en 1812, et c’est le premier écrivain que l’on rencontre (car ils seront nombreux, au cours de cette lecture) on va les découvrir, les uns après les autres…et vous verrez que Marguerite Yourcenar n’est pas loin !. Vous irez de surprises en surprises et pour cela il est presque impossible de le résumer. Simplement dire que le fil conducteur est un coffret marqueté dans lequel Sophie Rostopchine qui n’est pas encore la Comtesse de Ségur, a dissimulé son précieux journal et lorsqu’elle fuit Moscou vers Paris, son père Fiodor Rostopchine, qui était gouverneur de Moscou ayant mis le feu avant que n’arrivent les troupes napoléoniennes. Ce livre est donc à la fois, un hommage à la littérature mais c’est aussi un livre qui parle de transmission, d’héritage, de spoliation dans les années 39-45.
On fera la rencontre de Rose Valland, devenue résistante, attachée de conservation au Jeu de Paume, qui a fait un travail remarquable, au nez et à la barbe des allemands, relevant et notant clandestinement tous les mouvements des biens et chefs-d’œuvre volés aux juifs français par les nazis, au profit d’Hermann Goering, pour sa propre collection au château de Carinhall, mais aussi en vue de la création du futur musée de Linz imaginé par Hitler. Puis ce sera au tour des Russes de se servir sur les ruines du Reich ; de nombreuses œuvres d’abord volées par les Allemands sont emportées comme trophées de guerre dont beaucoup demeurent encore en Russie et n’ont toujours pas été restituées.
Ce livre écrit avec passion, magnifiquement bien construit vous fera traverser une trentaine de villes, une dizaine de pays puis vous rencontrerez une quantité d’écrivains et de héros connus ou moins connus, liés à l’histoire et la littérature.
Un travail d’érudition très dense, un travail de recherches remarquable qu’Emmanuelle Favier nous offre et vous ne vous ennuierez pas tout au long de ces 556 pages. Un roman historique très documenté, une riche écriture.
Librairie Doucet Le Mans/Marie-Christine
Emmanuelle Favier, née en 1980, est romancière, poétesse et nouvelliste ; elle a publié un premier recueil de nouvelles en 2012, « Confessions des genres » aux éditions Luce Wilquin – puis des nouvelles tirées à part « Les funérailles de Roberto Bolaňo« en 2020 éditions La Guépine -et deux romans, en 2017, « Le courage qu’il faut aux rivières » aux éditions Albin Michel (prix Révélation de la SGDL, prix coup de cœur des lycéens de la Fondation Prince Pierre de Monaco…)et « Virignia« (Albin Michel) en 2019, roman qui retrace l’enfance de Virignia Woolf avant qu’elle ne devienne écrivaine – prix jeune Mousquetaire de Nogaro, prix Poulet-Malassis de la ville d’Alençon, prix des lecteurs de la librairie l’ Esperluète de Chartres – Elle a récemment traduit « La Mégère apprivoisée » de Shakespeare (Les Belles Lettres, 2022)
La Part des cendres – 556 pages – prix : 22.50 € (parution août 2022)