Petit pays – Gaël Faye – Editions Grasset –

petit-paysLisez « Petit pays »,                                                                           Ecoutez l’album « Pili Pili sur un croissant au beurre » de Gaël Faye et vous serez comblés !

Comment raconter l’inexplicable, l’insoutenable ?

Gaël Faye, auteur-compositeur-interprète puis écrivain signe ce premier roman en nous relatant le drame rwandais, grâce à la voix enfantine de Gabriel (dit Gaby) âgé de 10 ans, avant que ne débute le génocide. Gaby sera le narrateur qui pratique malgré tout l’humour quand il relate les explications de son père entre Hutus, Tutsis et les raisons de la guerre…

L’histoire est inspirée de son enfance, celle d’un enfant métis, d’un père français et d’une mère rwandaise, d’ethnie Tutsi, vivant au Burundi, dans les années 1992. Il a une petite soeur Ana. Il habite le quartier international de Bujumbura où la famille est installée, quartier d’expatriés, plutôt paisible. Gabriel passe son temps entre la maison, l’école et se lie à une bande de copains avec qui il fait les 400 coups. Le couple se délite. La séparation va le perturber. Il nous raconte comment la guerre a éclaté, ravagé son pays, volé son enfance et tué les siens.

Peu à peu la guerre civile s’installe. Fini le jardin de jonquilles, le parfum de citronnelle. La cueillette de mangues a plutôt un goût amer. Fini les pirogues en tronc de bananier au bord du Tanganyika. Il se croyait encore un enfant, il se découvre métis, Français Tutsi….. une histoire, une tragédie qui a fait grandir Gabriel, un adieu à l’enfance plus vite que prévu.

Puis heureusement, il y a comme échappatoire la lecture avec de superbes passages, à propos des livres de la bibliothèque de Madame E. qui viennent adoucir les horreurs de la guerre (page 168) :

« Un après-midi, j’ai croisé Madame E. […] Elle m’a invité dans sa maison pour m’offrir un jus de barbadine. […] Dans son grand salon, mon regard a tout de suite été attiré par la bibliothèque lambrissée qui couvrait entièrement un des murs de la pièce. Je n’avais jamais vu autant de livres en un seul lieu. Du sol au plafond.

– Vous avez lu tous ces livres ? Oui. Certains plusieurs fois, même. Ce sont les plus grands amours de ma vie. Ils me font rire, pleurer, douter, réfléchir. Ils m’ont changée, ont fait de moi une autre personne.

– Un livre peut nous changer ? – Bien sûr, un livre peut te changer ! Et même changer ta vie. comme un coup de foudre. Mes doigts couraient sur les rayonnages, caressaient les couvertures, leur texture si différente les unes des autres. J’énonçais en silence les titres que je lisais. […] »  » Il faut se méfier des livres, ce sont des génies endormis ».

– ou comme ce magnifique échange épistolaire entre Gabriel et Laure, sa correspondante française (à Orléans), lorsqu’il est collégien.

« Le génocide est une marée noire, ceux qui ne s’y sont pas noyés sont mazoutés à vie » (p.185)

Un roman sur l’exil, la nostalgie de son enfance, sur le déracinement, sur l’histoire du Burundi. Un parfum d’enfance africaine au goût amer qui le hantera à tout jamais mais que l’auteur tente d’adoucir grâce à sa magnifique plume poétique qu’il manie avec grande habileté.

Ainsi, Gaël Faye fait renaître ce « Petit pays« , le Burundi, en nous offrant ce premier »grand roman » de 216 pages qui est une réussite. Sachez que « Petit pays »est en lice pour le Goncourt dont la proclamation du lauréat  est prévue  vendredi 4 novembre.

Marie-Christine

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Propulsé par WordPress.com.

%d blogueurs aiment cette page :