« A 13 ans, je ne connaissais plus mon autre mère ».
Ainsi débute « La Revenue »
La narratrice est adulte maintenant et elle se souvient. Jusqu’à l’âge de 13 ans, dans les années 70, elle habitait en ville, au bord de la mer. Elle était fille unique, avait des amies et vivait dans l’aisance.
Brutalement elle apprend qu’elle n’est pas la fille des gens qui l’ont élevée et aimée. Brutalement, en effet, puisqu’elle doit les quitter pour être rendue à sa famille biologique.
La voilà dans un monde très différent. Elle se retrouve à la campagne, dans une famille nombreuse, pauvre, dans laquelle on parle non pas l’italien mais un dialecte. Elle vit la promiscuité en partageant sa chambre avec ses frères et sa sœur. Elle connaît la violence, les repas maigres et l’absence d’amour. Elle se retrouve « orpheline de deux mères vivantes ».
Pourquoi ce deuxième abandon en quelque sorte ? Qu’a-t-elle fait pour mériter cela ? Que s’est-il passé ?
Ici dans le village, elle est « L’ Arminuta« (c’est le titre dans ce dialecte des Abruzzes), « La Revenue« . Comment se construire, même si l’on est une excellente élève, quand on se sent différente, quand on ne sait plus qui on est, quand on a personne à qui se rattacher.
Mais si ! Il y a un grand frère, sans doute un peu trop proche d’ailleurs, un autre, un bébé, au retard mental et si attachant et surtout sa sœur plus jeune mais forte, qui sait s’imposer, se révolter et permettre beaucoup de tendresse en devenant sa complice.
« Ma sœur. Une sorte de fleur improbable qui avait poussé sur un petit amas de terre accroché au rocher. C’est elle qui m’a appris la résistance ».
L’ auteure veut aussi ne pas oublier ses racines dans les Abruzzes. Elle nous restitue le terroir auquel elle reste très attachée.
L’écriture est concise, incisive, efficace et aussi pleine de pudeur et de délicatesse.
Ce texte est bouleversant tout en évitant le pathos. Donatella Di Pietrantonio nous livre un portrait d’adolescente qui doit renaître et prendre place dans ce monde qui lui semble détruit. C’est un roman d’initiation et de construction, de reconstruction aussi bien sûr. Pour tout lecteur.
Un texte que l’on ne peut pas oublier !
Marie-José/M.Christine
Donatella Di Pietrantonio est née dans un village des Abruzzes en Italie et a déjà publié deux romans très remarqués, « Mia madre è un fiume » (2011) et « Bella mia » (2014) avant ce dernier « La Revenue » qui a obtenu le prestigieux Prix Super Campiello 2017.
« La Revenue » – 240 pages – prix : 20€ – Traduit de l’italien par Nathalie Bauer